L'habit fait le samouraï, Samouraï, armure du guerrier au musée du quai Branly

" Le temps était enfin arrivé. Tout ce qu'il avait préparé. Tout ce qu'il avait organisé. Toute cette énergie dépensée n'avait pour but que de préparer cette nuit de printemps. L'heure était enfin venu. Il sentait arriver en lui ce grand soulagement, une émotion qu'il n'avait jamais connu.

Sa vie n'avait été que tension et devoir. On ne lui avait pas appris à se détendre. Et même si cette perspective le réjouissait au plus profond de son cœur, il arrivait encore à se dire qu'il ne devait pas. Mais aujourd'hui, en regardant autour de lui, il se rassura. Il avait bien œuvré. Il allait pouvoir transmettre le flambeau de la famille serein, assuré qu'il ne serait pas bafoué. Il l'avait bien éduqué. En lui apprenant ce qu'était un chef de famille, il savait qu'il pouvait partir tranquille. C'était un bon fils. Appliqué. Dévoué. Et du haut de sa chaise de patriarche, il voyait le bel homme qui allait lui succéder. Le vieux Daïmio malade qu'il était devenu se retirait et laissait la place. Mais dignement, pour cette ultime cérémonie, et comme pour montrer à tous ce qu'il avait été tout au long de sa vie, ce qu'il avait accompli, il se leva, portant son armure qui l'avait accompagné tout au long de sa vie telle une amante fidèle. Son armure qui était le symbole de sa puissance et de sa sagesse. Même malade et au crépuscule de sa vie, il restait ce qu'il avait toujours été, ce qui avait rendu fier sa famille, il restait un samouraï."

Le samouraï.. Ce chevalier japonais aussi bien source de légendes, mais aussi d'interrogations et d'exotisme pour nous occidentaux peu connaisseur dans cette caste japonaise si particulière. Et c'est à travers leurs armures, bijoux d'artisanat et héritage le plus précieux des grandes familles japonaises, que le musée du quai Branly nous fait découvrir, le temps d'une expo, le mythe derrière ces impressionnantes tenues. L'exposition nous propose donc au travers de ces 140 armures et accessoires en tout genre, de nous retracer une partie de l'histoire d'un des plus prestigieux ordres du Japon médiéval. Et pour tout dire, on est assez vite scotché. Les premières pièces que l'on découvre sont tout simplement hallucinantes de conservation. Les plaques de métal laqué, les cordons de chanvre ou encore les cuirs décorés semblent tout droit sorti de l'établi. L'armure du samouraï à beau être une chose que l'on se passe de générations en générations, il faut bien reconnaître que les japonais, déjà maître dans l'art du détail, font ici montre de toute leur méticulosité à garder ces pièces comme neuve. Les époques se succèdent et se croisent et le constat est le même à chaque fois. Je vous assure que c'est assez impressionnant. De plus les différents textes qui parsèment la scénographie sont bienvenues pour expliquer ici un terme technique, là le contexte dans lequel l'armure que l'on observe se situe. 

La scénographie justement, elle est pour le moins propre et claire. On ne se perd pas, les œuvres (car oui on peut parler d’œuvres ici !) s’enchainent aisément et on se laissent volontiers bercer par le rythme de l'expo. On nous détaille les différentes références dans lesquelles les maîtres armuriers puisaient leur inspiration. Qu'elles soient animalières, végétales ou mêmes référentes au culture étrangère, on découvre à chaque fois à quel point ils essayaient  de se renouveler et de parcourir des chemins nouveaux. On se prête à sourire, parfois à s'ébaillir mais on est toujours emporté par la beauté des pièces présentées. On en apprend plus sur ce qui faisait la richesse de ces grandes familles, ce qui les emplissaient de fierté, parfois plus que de raison, et ce qui a autant contribué à la toute puissance du Japon en Asie, comme à sa chute. Car il ne faut pas oublier que les samouraïs étaient des guerriers avant tout, prêt à tout pour assoir leur pouvoir. Et l'armure était un symbole de ce pouvoir. A celui qui avait la plus belle, la plus richement décorée ou faites par le plus connu des maîtres armuriers. Et la rivalité devait être intense. (on dirait aujourd'hui la même chose avec nos belles voitures ou nos belles montres... vous avez tous votre Rollex j'espère...)

Bref vous l'avez compris je vous recommande chaudement cette expo. Que vous soyez amateur d'histoire nippone, curieux d'un habit rendu mythique par le cinéma (Les 7 samouraïs d'Akira Kurosawa en tête) ou tout simplement l'envie de voir une belle expo bien faites, je vous invite à vous y précipiter. L'expo dure jusqu'au 29 janvier 2012, vous avez tout le temps ! Et puis cerise sur le gâteau, vous profiterez du reste du musée du quai Branly (superbe musée soit dit en passant), le billet pour l'expo étant celui pour le musée en lui-même. Voilà vous n'avez plus de raisons de ne pas y aller.